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Pêche et littérature, "nature writing", livres de pêche.

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Un blog pour parler de pêche et de littérature. Pour contempler les rivières et les lacs, leurs poissons.

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Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir

Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourirPeter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir, Ed. Actes Sud, octobre 2015
 
 
 
Peter Heller est un écrivain américain, aventurier et touche à tout. Livreur de pizza, kayakiste ayant descendu les plus grandes rivières du globe, marin et reporter pour le compte du National Geographic Adventure sur le Sea shepherd pour défendre les baleines, garde pêche et pêcheur à la mouche. Il a fait une entrée remarquée dans la littérature nord-américaine avec un premier roman post apocalyptique, La constellation du Chien. Son second livre n'en est pas moins remarquable.Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir
 
«  Laisser à la liberté une chance de se frayer un passage entre les mailles de l'inexorable »,

Denis Duclos, Le complexe du Loup-Garou,
la fascination de la violence dans la culture américaine.
 
Heller écrit avec un style percutant, presque rude dans sa forme pour aller chercher l'essentiel des sentiments sans détour ni fioriture. Ses mots sentent le tabac à chiquer, le sang séché, la poussière, l'humidité d'une cascade, la peinture fraîche, la mousse des rivières ou l'odeur acre d'une truite vidée d'un coup de canif. Un style âpre et brusque à rapprocher de celui d'Hemingway dans Les Aventures de Nick Adams. Le style de Heller vous attrape, comme le début d'une bagarre à l'ancienne quand un type vous choppe par le col, puis l'auteur mêle poésie, contemplation, sensualité par une série de tensions entre les circonstances et le caractère de son héros. Heller dépeint Jim Stegner, c'est un homme méchamment blessé par la vie, plein de remords terribles pour ne pas avoir suffisamment entendu les appels au secours de sa fille Alce. Alce était son unique amour après deux divorces. Alce était son recours, sa résilience, sa bouée. C'est à elle qu'il a donné les premiers rudiments de la pêche à la mouche, à qui il a fait goûter les aurores ou les coups du soir au bord de l'eau, contempler les constellations lorsqu'ils étaient couchés sur la grève d'une rivière. Alce finira par pêcher bien mieux que son père et finalement bien mieux que tout le monde. Mais il ne l'a pas entendue, il n'a pas su l'entendre. Amoureuse éperdue d'un petit dealer, elle sera massacrée par des salauds. Jim Stegner porte cette blessure au plus profond de lui. Il tente de survivre grâce à la peinture, à la pêche, à l'amour parfois. Il ne peut oublier, son caractère est violent et n'est que le reflet de son âme, tueur occasionnel, inattendu. Le combat physique dans un ravin boueux, sur les rochers d'une rivière à coup de poings, de pierre, ou de calibre 41, est porté par l'intensité de l'écriture. La violence devient l'expérience de la vie elle-même, sa vie est catastrophée comme le cours des rivières. Mais ce parcours accidenté et désastreux ne dissimule pas la force de l'introspection et de l'analyse. C'est la force de ce roman. Jim Stegner tue quand il est au bord de l'eau, quand il est à la pêche pour oublier au milieu d'un paysage virginal. Serial fisher et serial Killer ne font qu'un.
 
Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir
Drawings By Gavin Erwin
http://www.fishthesea.co.za/gallery/fishartforsale.htm
 
 
« Adam pêchait-il ? Nous demanda t-il. Des exemples de lancer à la mouche au paradis ? Non, la pêche est l'apanage du monde corrompu, imparfait. Au Paradis on y renonce. »,

Wallace Stegner, Lettres pour le monde sauvage, Ed. Gallmeister, 2015
 
Wallace Stegner est lui un écrivain très nature writing dont l'un des livres a été traduit aux éditions Gallmeister. Je crois peu au hasard, notamment à celui de l'homonymie avec le héros de Heller, Jim Stegner. La concordance des publications françaises ne fait pas une référence assumée, pourtant, ils ont tous deux la même conscience que le paysage américain résume, malgré sa beauté, une grande part de tragique. Le wilderness, la nature sauvage, virginale, le Paradis du premier jour, immaculé, est maintenant un espace rêvé, interprété, regretté. Il n'a plus la valeur hypnotique que peut lui donner le sublime, ce n'est plus un paysage dans lequel le moi peut se perdre, être submergé, se dissoudre. Déjà chez Hemingway dans Sur l'écriture (1924), manuscrit adjoint à sa magnifique nouvelle La grande rivière au c½ur double, le paysage scénique de la rivière est un lieu où l'âme humaine peut encore se perdre mais ne retrouvera pas la plénitude de sa conscience, le repos et la rémission. Le paysage de la rivière que ce soit en plongée ou en contre-plongée est plus rêvé et parcouru que contemplé. Nick Adams le héros d'Hemingway est certes « marié à la pêche », il descend dans la rivière en se demandant comment le peintre Cézanne l'aurait interprété. Il s'agenouille dans l'eau, fouille dans son sac pour libérer une truite et la regarder se faufiler entre les pierres. Dans Le dernier beau coin du pays écrit plus tard, la truite est assommée puis vidée dans une sorte de mise à mort tauromachique et jouissive. La rivière n'est plus que rêvée, elle l'est magistralement dans Maintenant je me couche où Hemingway invente des rivières pendant ses nuits d'insomnie, il croit même y avoir pêché en vrai, il leur donne un nom. La rivière est le lieu de l'oubli de soi, « Toutefois, je finis par revenir à la pêche, après avoir réalisé que je me souvenais avec précision de toutes les rivières et que j'y trouvais toujours quelques chose de neuf, tandis que les jeunes filles s'estompaient invariablement dans mon esprit ». Un lieu de rédemption immanquablement lié à la nature de l'homme moderne qui cherche à oublier, à se faire pardonner ses fautes, ses crimes. Ce n'est plus le lieu de la résilience, les eaux de la rivière ne sont plus les eaux lustrales et celles du baptême, de la renaissance comme dans La grande rivière au c½ur double. Et, c'est encore plus vrai avec Peter Heller, la rivière à truite est toujours adossée à une route par les deux bouts, elle mène à la ville et à sa corruption, cheminement parallèle et chaotique renvoyant à des possibles tragiques. Entre la route et la rivière, Jim Stegner y installe souvent son chevalet (tandis que la canne à mouche est posée sur la carrosserie du pick up autre parallèle saisissant) avec un colt calibre 41 coincé dans une ouverture sensée accueillir un bocal, prêt à faire feu au cas où. La rivière est maintenant le lieu du crime, la scène du crime elle-même, en l'espace d'une fulgurante violence, on passe de l'american dream à l'american drama.
 
Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir
Drawings By Gavin Erwin
http://www.fishthesea.co.za/gallery/fishartforsale.htm









J'ai dit : «  Je suis en état d'arrestation ? »
Non !
« Je peux aller à la pêche, alors ? »,

Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir.
 
La peinture n'aide pas Jim Stegner à surmonter la disparition d'Alce, elle le ramène trop vers la sociabilité du monde urbain, les galeries d'art, son agent, ses clients, l'argent. L'art ne l'aide pas : « ... que ma fille est morte pour rien. Que je ferais mieux d'aller pêcher avant que mon cerveau ne parte en vrille ». Seule la pêche peut l'aider parce qu'elle lui rappelle ses parties de pêche avec Alce, la communion des jours heureux, des bonheurs partagés, de la joie simple et sincère d'être ensemble et de se regarder, de se trouver beau au milieu de l'eau, une canne à la main. Cela existe, vous le savez, vous qui pêchez, vous êtes initié et vous l'avez déjà éprouvé, je n'en doute pas. Jim va à la pêche comme on va chez son thérapeute. Il invente des mouches comme la Stegner killer (prémonitoire ?) ou en fabrique de plus classiques comme la Royal coachman, des mouches sèches ou noyées selon la nécessité, même s'il ne dédaigne pas envoyer un petit streamer comme un wooly bugger ondoyer dans les courants. Il pêche aussi avec des nymphes comme la classique pheasant tail ou la bead head prince ou encore une Copper John. C'est un pêcheur à la mouche éclectique et donc accompli, qui pêche avec du matériel de prix selon la vente de ses tableaux. Certains s'anéantissent dans l'alcool, lui va à la pêche, c'est l'unique moment où il peut oublier l'absence de sa fille, s'oublier lui-même, oublier le temps : « Le temps passé, le temps présent. Quelque soit le temps qui régule la terre, il avait reculé dans les ombres de la nuit. J'ai lancé, lancé encore.... » Le mouvement de métronome de la canne semble figer le temps puis ouvrir une faille dans laquelle il peut se lover, comme dans une parenthèse le protégeant momentanément de son destin tragique et de sa cohorte de malheurs et de crimes. L'amour avec Sophia (la sagesse de la Grèce antique ? Une anti Stegner killer ?) l'apaise presque tout autant que la pêche : « Elle m'a fait l'amour encore et encore jusqu'à j'ai mal et que je halète comme une truite hors de l'eau, puis elle me tenait dans ses bras, là aussi comme une truite, pour que je reprenne mon souffle, et ensuite elle me laissait m'endormir » abolissant tout sentiment de peine et de remords, amnistiant le criminel, une « graciation » comme acte d'amour. On peut bien pratiquer le catch and release avec un pêcheur à la mouche.
 
Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir
Drawings By Gavin Erwin
http://www.fishthesea.co.za/gallery/fishartforsale.htm
 









La pression froide sous la mâchoire. L'acier.
Avant même de me poser la question j'ai su que c'était un revolver.
« Bon choix la nymphe. J'aurais fait la même chose, je crois »,

Peter Heller, Peindre, pêcher et laisser mourir.
 
Jim Stegner semble tout bousiller dans sa vie, sauf ses parties de pêche, quoi que... C'est encore dans la rivière et à la pêche que le drame de sa vie va trouver une résolution durable. A genoux dans l'eau, piégé, le canon d'une arme sur la face, les waders se remplissent d'eau glacée, il perd sa canne, une Sage à 5 brins avec laquelle il a appris sa fille à pêcher, il pleure, il sait la fin de la partie toute proche, les souvenirs disparaîtront ainsi que l'odeur du café du matin, la chaleur de Sophia, le grain de sa peau, le parfum des rivières, les reflets de la lune dans l'eau, et, j'imagine, le sourire d'Alce lorsqu'elle se retournait en regardant son père pour lui montrer sa canne plier par le combat d'une belle truite, la sensation vivifiante de la touche, et toutes sortes d'émotions intenses et fugaces que l'on éprouve à la pêche ou en amour et qui mises bout à bout font des souvenirs solides pour les jours de tempête. Jim va y passer, peut-être... « J'ai imaginé te couper les mains. Ce qui rendrait la peinture et la pêche un peu plus difficile. Mais, bon ça t'empêcherait pas de baiser. Du coup, je pourrais te couper la bite, aussi. Je pourrais. Aussi simple que d'ouvrir une truite. »
 
Chamane 51, le 11/10/2016
 
 
Pêche et littérature, nature writing, livres de pêche.
Jean-Marie Rouffaneau, Histoires de pêche, Rabouin
Chamane51, Le Guide (souvenirs des Hébrides)
Numa Marengo, La pêche et Platon
Philippe Cortay, Les murmures du Versant
Serge Sautreau, Après-vous mon cher Goetz
Maurice Constantin-Weyer, La chasse au brochet
Denis Rigal, Eloge de la truite
Jean Rodier, En remontant les ruisseaux
Joan Miquel Touron, La belle histoire de la pêche à la mouche
Henri Bosco, Malicroix
Henry David Thoreau, Journal (22 octobre 1837-31 décembre 1840)
Laurent Madelon, Plaisirs de la pêche en montagne
René Hénoumont, Le jeune homme et la rivière
John Gierach, La-bas les truites...
Jacques-Etienne Bovard, La pêche à rôder
J. de Lespinay, Si vous prenez la mouche . . .
Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche
Serge Sautreau, Le rêve de la pêche
Sean Nixon, Les Nuits du Connemara
Pierre Clostermann, La prière du pêcheur
Pierre Clostermann, Des poissons si grands
Pierre Clostermann, Mémoire au bout d'un fil
Pierre Clostermann, Spartacus, l'espadon
Maurice Genevoix, Tendre bestiaire
Maurice Genevoix, Rémi des Rauches
Jim Harrison, Gary Snyder, Aristocrates sauvages
Pierre Perret, Les poissons et moi
John Gierach, Même les truites ont du vague à l'âme
Pierre Affre, La vie rêvée du pêcheur
Jean-Pierre Comby, Rêves de pêcheur
Henry D. Thoreau, Walden, préface de Jim Harrison
Bartolomé Bennassar, Les rivières de ma vie, Maurice Toesca, Rêveries d'un pêcheur solitaire.
Cormark McCarthy, La route
William G.Tapply, Casco Bay, Dark Tiger
Histoire d'ombres, Hervé Jaouen
Les pieds dans l'eau, René Fallet
Elisée Reclus, Histoire d'un ruisseau
Justin Cronin, Quand revient l'été
Les Ardennes à fleur d'eau, Terres ardennaises
La mouche et le Tao, Philippe Nicolas
Brève histoire de pêche à la mouche de Paulus Hochgatterer
Un bon jour pour mourir de Jim Harrison
La femme truite de Vincent Lalu
La grande rivière au coeur double, Ernest Hemingway
L'enfant et la rivière d'Henri Bosco
L'enchantement de la rivière de Philippe Nicolas
Le Traité du zen et de l'art de la pêche à la mouche de John Gierach
Partie de pêche au Yemen de Paul Torday
Le Testament d'un pêcheur à la mouche de John D. Voelker
Tags : Peter Heller, Wallace Stegner, Hemingway, Nature writing, Wilderness, Truite, Nymphe, Mouche, streamer, Pêche à la mouche, Cézanne
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#Posté le vendredi 11 novembre 2016 03:39

Modifié le dimanche 28 janvier 2018 16:51

René Hénoumont, Le jeune homme et la rivière, Récit de nature, Éditeur Bernard Gilson, 2008

Le jeune hommeRené Hénoumont, Le jeune homme et la rivière, Récit de nature, Éditeur Bernard Gilson, 2008 et la rivière, René Hénoumont

Il y a des hom
mes qui mêlent intimement le cours de leur vie à celui des rivières de telle sorte qu'évoquer le nom de l'une d'elles suffit à ouvrir des pans entiers de la mémoire.

L'Ourthe, l'Amblève, la Semois, la Lesse, les rivières de René Hénoumont — toutes de fières Ardennaises — sont autant de pages
biographiques et à les lire, la promenade est belle.

« J'étais au comble du bonheur aux côtés de mon père
qui roulait une cigarette à côté de moi,
dans la barque », R. Hénoumont.


Et pourtant l'année de ses dix-huit ans il reçoit son premier lancer léger, c'était le 10 mai 1940, Hitler lançait son offensive dévastatrice sur les Pays-Bas et la Belgique. Ce fut l'exode en vélo avec la précieuse canne en sautoir jusque dans l'Aude, havre de paix et de pêche. Découverte de la pêche à la cuiller, au vairon manié, des torrents de montagne, de leurs cascades et des lacs d'altitude. La pêche s'apparente alors, grâce au lancer léger, à une traque, une chasse en un temps où la provande des rivières paraissait sans fin.

René Hénoumont se souvient avec émotion de tous ces lieux où les pages de sa vie ont pris soudainement un éclat particulier. Pas de triste nostalgie dans son écriture, pas de regrets non plus, juste la satisfaction qu'en choisissant la pêche il ne s'était pas trompé.


« L'été lorsque l'Ourthe se couvrait
de petites fleurs blanches de la renoncule d'eau,
la rivière devenait prairie
et moi au milieu j'étais au comble du bonheur. »,
R. Hénoumont.


On ne se trompe jamais lorqu'on choisit les eaux vives et les eaux dormantes et on se trompe encore moins lorsqu'on choisit la pêche. C'est d'ailleurs écrit dans les livres, les « bibles » de René Hénoumont, Michel Duborgel, Maurice Constatin-Weyer, Tony Burnand ou plus littéraires encore Maurice Genevoix et Ernest Hemingway. Avec de telles lectures, difficiles de trouver des raisons d'avoir tort !

Et pas de raison de se perdre non plus ! Car l'auteur retourne à sa rivière, celle de sa vie, « L'Ourthe, il y eut comme un roman d'amour entre le jeune homme et la rivière. » Il en connaît en mémoire toutes les subtilités, les sensations et les sens s'échauffent à entendre le nom de sa rivière.

« Ô les petites chansons des cours d'eau des Ardennes !...
leurs chansons douces qui font rêver les poètes
et frissonner les amoureux
qui se confient des je t'aime et des toujours... »,
Jacques Théret, Les Ardennes à fleur d'eau.


Il y aurait donc des hommes qui ne seraient pas d'un pays de terre, de bois et de village, des hommes qui délaisseraient les cheminées fumantes et les sonnailles des cloches pour préférer les rivières. Des hommes dont la seule patrie serait celle des eaux vives. René Dhôtel, cet autre écrivain des Ardennes, pêcheur passionné également, n'évoquait pas autre chose dans Terres de mémoire, « En réalité ma plus vive expérience des Ardennes ne fut pas la terre mais l'eau ». Il y a en effet des hommes, des pêcheurs en particulier, dont toute leur histoire est constituée par la pratique des eaux vives, qui par l'effort, la patience et la surprise, dans le tumulte et la sérénité de la rivière, trouvent une unité. C'est peut-être là une vérité universelle.

André Dhôtel, lui aussi, affirmait avec force (et à le relire cela sonne davantage comme une proclamation) : « La rivière est à moi. Vous me parlez de racine, mais moi je n'ai pas de racines, puisque c'était de l'eau. » Ainsi, la rivière est devenue une part intime de l'homme, sa part secrète faite de rêves récurrents, de veines d'eau tressées, d'appels pressents à venir arpenter ses berges et son lit et de souvenirs intenses de poissons pourchassés et relâchés. Il est en somme, par un curieux renversement, possédé et habité par la rivière.

Avec une parole définitive, presque testamentaire, il nous dit que le monde si précieux et infini de la rivière suffit à combler la vie d'un homme.

Chamane 51

Si vous voulez continuer la promenade, deux sites de passionnés de pêche à visiter :
René Hénoumont, Le jeune homme et la rivière, Récit de nature, Éditeur Bernard Gilson, 2008
http://www.naturellement-peche.info/


René Hénoumont, Le jeune homme et la rivière, Récit de nature, Éditeur Bernard Gilson, 2008
g0nefishin9.wordpress.com

Articles précédents :
Pêche et littérature, nature writing,
livres de pêche.

John Gierach, La-bas les truites...
Jacques-Etienne Bovard, La pêche à rôder
J. de Lespinay, Si vous prenez la mouche . . .
Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche
Serge Sautreau, Le rêve de la pêche
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Histoire d'ombres, Hervé Jaouen
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Justin Cronin, Quand revient l'été
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Brève histoire de pêche à la mouche de Paulus Hochgatterer
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La femme truite de Vincent Lalu
La grande rivière au coeur double, Ernest Hemingway
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Le Traité du zen et de l'art de la pêche à la mouche de John Gierach
Partie de pêche au Yemen de Paul Torday
Le Testament d'un pêcheur à la mouche de John D. Voelker
 

Tags : Hénoumont, Duborgel, Maurice Genevoix, Tony Burnand, Maurice Constatin-Weyer, Hemingway, Ardennes, André Dhôtel
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#Posté le vendredi 28 septembre 2012 13:11

Modifié le lundi 10 décembre 2012 01:31

John Gierach, Là-bas les truites. . ., Ed. Gallmeister, 2012


John Gierach, Là-bas les truites. . ., Ed. Gallmeister, 2012
 Là-bas, les truites..., John Gierach
 
 
Un livre de Gierach publié, c'est comme si votre anniversaire arrivait avant l'heure ! C'est à coup sûr une bonne idée pleine de promesses. Les éditions Gallmeiter nous avaient déjà offert la traduction de deux ouvrages de Gierach qui ne sont pas passés inaperçus dans le petit monde de la pêche et de la littérature et du nature writing. Voici-donc le troisième avec Là-bas, les truites...
 
« Que la forêt et la rivière étaient vraies,
de plus en plus vraies à mesure que vous vous éloignez de votre maison », 
John Gierach, Là-bas, les truites...
 
En neuf récits, John Gierach évoque ses coins secrets, ses petits Eldorados de pêche dans lesquels les truites ne sont ni farouches ni petites. À cinq ans déjà, il s'enfonce avec ses copains dans la forêt, comme des Indiens précise-t-il, pour rejoindre la rivière dont on dit que plus loin en aval les poissons chats sont plus gros. Premier apprentissage de la nature et de la transgression des règles. Et pourtant, Nick Adam, le jeune héros d'Hemingway, si ce n'est Hemingway lui-même, dans Les forêts du Nord, fait ses premiers apprentissages de la nature près d'une rivière dans les bois, mais lui n'en menait pas large. À croire que pour pêcher, il faut oser partir loin, maîtriser la crainte qu'inspire l'inconnu, s'éloigner et délaisser les hommes (et les femmes aussi), les oublier, du moins ceux qui ne pêchent pas, pour se consacrer tout entier à la pêche. Un coin secret, ça vaut quand même sacrément le coup. Certain d'y être seul en tête à tête avec les truites, de quoi oublier le monde comme il est :  « la nature était là ; elle était vaste ; elle était constante » écrit Gierach.
 
 Le coin secret est un morceau de Paradis personnel, en dehors des cartes légendées et des lieux-dits, des courbes de niveaux et de la boussole. Hemingway (toujours et encore) s'en fabriquait en rêve « ... et j'imagine que j'y pêche et les confonds avec les ruisseaux que je connais réellement... » écrit-il dans Je vous salue Marie. Le coin secret est d'abord un coin rêvé puis pêché en vrai ensuite. Il est en dehors du temps, de l'échelle du temps rythmé par le chronomètre et les indices boursiers qui ne dorment jamais. Gierach insiste « Les pêcheurs, voyez-vous, n'ont que deux repères temporels : maintenant et jamais. », ce qui fait que le pêcheur est davantage connecté avec l'endroit où il pêche qu'avec le monde comme il va (son envers). Nick Lyons, autre célèbre écrivain-pêcheur nord-américain ( également auteur d'un The Gigantic book of fishing stories de 793 pages ) confesse qu'au fur et à mesure de sa partie de pêche il parvenait à entrer en concordance avec le tempo du poisson avec lequel il pêchait (dans Confessions of Fly Fishing Addict) ; il va même plus loin dans une saison de pêche à Spring Creek où, au bout de deux semaines de pêche, il perd progressivement la notion du temps et qu'au bout de quatre semaines seuls comptent la faim, la soif, la pluie ou le vent, des impressions élémentaires induites par le milieu et qui dictent une conduite propre au milieu.
 
« Là-bas les truites...
sont toutes grandes comme ta jambe. »,
John Gierach, Là-bas, les truites...
 
Les coins secrets rendent les pêcheurs... secrets : « cache ton pick-up pendant que tu pêches, et ferme-là ensuite. N'hésite pas à mentir si besoin, même si cela doit t'interdire de frimer » écrit Gierach. Évidemment, le type qui tient son petit Eldorado de pêche doit être un peu nerveux lorsqu'il sort du bois et c'est peut-être à cela qu'on le reconnaît, à moins qu'il soit étonnamment zen et on le reconnaîtra tout autant. Une attitude sociale que Gierach avait résumée dans un précédant ouvrage Trout bum (traduit en français par Le Traité du Zen et de l'art de la pêche à la mouche, Editions Gallmeister, 2009), attitude qu'il précise ici comme étant celle d'un ermite vagabond autarcique, sans réel itinéraire, parlant peu et uniquement par phrases courtes. Un style de vie que l'on devine aisément. La pêche à la mouche serait alors une culture alternative faite d'addiction à une pratique et à un milieu, une sorte de rébellion face à une société de consommation dont le temps se mesure en unité de valeur et en prédation écologique. C'est ici que l'auteur est rattrapé par l'envers du décor. Les coins secrets deviennent plus rares, plus inaccessibles. Les températures augmentent, les précipitations sont modifiées par le réchauffement climatique. Angoissante problématique que Gierach n'évacue pas. Il en appelle plusieurs fois à Henry David Thoreau (toujours en encore), auteur américain du milieu du XIXe siècle qui revêt aux États-Unis une importance fondatrice pour sa vision esthétique et écologique de la nature, notamment dans Walden (publié il y a peu par les éditions Le mot et le reste et préfacé par Jim Harrison). Il passe un an en ermite dans une cabane au bord d'un lac perdu dans les bois. Sur le ton d'une méditation, Gierach continue Thoreau, car la pêche à la mouche est aussi une construction d'une éthique de l'environnement.
 
En ce sens, Là-bas, les truites... n'est pas seulement un livre jubilatoire sur la pêche, c'est aussi un plaidoyer politique pour l'environnement, pour la permanence de ses coins secrets, oasis écologiques, derniers reflets du Paradis perdu ou d'un âge d'or dont on garde, pour quelques temps encore, le souvenir. Thoreau (une dernière fois) l'évoque déjà en son temps avec nostalgie dans A week on the Concord and Merrimack rivers. Il aperçoit, en effet, au cours d'une descente en canoë un vieux pêcheur entrer dans une cabane à peine dissimulée par le feuillage des arbres, avec à la main quelques poissons : « Je crois que nul autre que moi ne le voyait ou ne se souvient de lui, car il mourut peu après... Pêcher pour lui n'était pas une sorte de sport ou juste un moyen de se nourrir. C'était plutôt un genre de couronnement majestueux, à l'écart du monde, à l'image des anciens lisant leur Bible. »
 
En dehors des cartes, en dehors du temps, ces Eldorados de la pêche, derniers reflets du Paradis perdu, oasis écologiques ou âge d'or presque révolu, les coins secrets révèlent notre présence au monde des eaux vives et des eaux dormantes. Avec ces 88 pages de douce nostalgie souvent souriante John Gierach sait être rêveur, alors rêvons avec lui !
 
« Les coins secrets sont l'âme de la pêche »,
John Gierach, Là-bas, les truites...
 
Chamane51, le 07/09/2012
(Article publié dans Légendes de pêche
et Le monde de la truite)
http://www.lemondedelatruite.com/
John Gierach, Là-bas les truites. . ., Ed. Gallmeister, 2012

legendesdepeche.blogspot.fr
John Gierach, Là-bas les truites. . ., Ed. Gallmeister, 2012
 













Articles précédents :
Pêche et littérature, "nature writing",
livres de pêche.
 
Jacques-Etienne Bovard, La pêche à rôder
J. de Lespinay, Si vous prenez la mouche . . .
Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche
Serge Sautreau, Le rêve de la pêche
Sean Nixon, Les Nuits du Connemara
Pierre Clostermann, La prière du pêcheur
Pierre Clostermann, Des poissons si grands
Pierre Clostermann, Mémoire au bout d'un fil
Pierre Clostermann, Spartacus, l'espadon
Maurice Genevoix, Tendre bestiaire
Maurice Genevoix, Rémi des Rauches
Jim Harrison, Gary Snyder, Aristocrates sauvages
Pierre Perret, Les poissons et moi
John Gierach, Même les truites ont du vague à l'âme
Pierre Affre, La vie rêvée du pêcheur
Jean-Pierre Comby, Rêves de pêcheur
Henry D. Thoreau, Walden, préface de Jim Harrison
Bartolomé Bennassar, Les rivières de ma vie, Maurice Toesca, Rêveries d'un pêcheur solitaire.
Cormark McCarthy, La route
William G.Tapply, Casco Bay, Dark Tiger
Histoire d'ombres, Hervé Jaouen
Les pieds dans l'eau, René Fallet
Elisée Reclus, Histoire d'un ruisseau
Justin Cronin, Quand revient l'été
Les Ardennes à fleur d'eau, Terres ardennaises
La mouche et le Tao, Philippe Nicolas
Brève histoire de pêche à la mouche de Paulus Hochgatterer
Un bon jour pour mourir de Jim Harrison
La femme truite de Vincent Lalu
La grande rivière au coeur double, Ernest Hemingway
L'enfant et la rivière d'Henri Bosco
L'enchantement de la rivière de Philippe Nicolas
Le Traité du zen et de l'art de la pêche à la mouche de John Gierach
Partie de pêche au Yemen de Paul Torday
Le Testament d'un pêcheur à la mouche de John D. Voelker
Tags : Nick Lyons, coins secrets, Paradis perdu, âge d'or, Nature writing, Hemingway, John Gierach, Henry D. Thoreau
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#Posté le jeudi 30 août 2012 02:47

Modifié le mercredi 19 décembre 2012 05:07

Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche, Mercure de France, 2007

Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche, Mercure de France, 2007
 
Sophie Massalovitch, Le goût de la pêche
 
 
 
 
Voilà un petit livre bien utile au pêcheur. Un petit format qui tient dans la poche ou dans le gilet du moucheur s'il reste de la place et que l'on peut sortir au soir, après la partie de pêche, en sirotant quelque chose ou en fumant sa dernière cigarette. Sophie Massalovitch nous offre un recueil de textes qui donne matière au goût de la pêche. Un petit livre de pêche précieux que l'on feuillette, curieux comme un livre de recettes à la recherche de curiosités ou de retrouvailles et nous met l'eau à la bouche.
 
 
 
« ... mais tu peux me croire les femmes aiment beaucoup les caresses
sous le ventre, comme les truites ...
ou alors ce ne sont pas des vraies femmes. »
 Jean-Marie Boëlle, Le Bar du salut, in Le goût de la pêche.
 
On y trouve une collection d'auteurs, classés en quatre chapitres (Goûter la pêche, Rêver la pêche, Voir la pêche, Vivre la pêche) : Hemingway, Genevoix, Bosco, Clostermann comme le bon pain sur la table, mais aussi des auteurs moins connus comme Aksakov, Tourgueniev, Paoutovski, ou Charras comme des gourmandises inconnues et irrésistibles posées là tout proche à portée de main. Comment résister  à autant d'appâts ? Difficile, vraiment ! C'est là tout l'attrait de ce petit livre une fois lu on le garde pour refaire la balade et passer des rivières aux lacs, des truites aux brochets avec autant d'auteurs et de styles. Je le garde et je le range dans ma boîte à pêche pour les longues journées de bredouille (il y en a ...) ou les soirs de bivouac dans la montagne près des ruisseaux à truites (pour bientôt...)
 
« Partons, partons, l'heure sonne !
Allons loin, bien loin, bien loin,
Pour ne rencontrer personne,
Et pêcher dans un bon coin !
 
Il part avec ses lignes. »
L'Ouverture de la pêche, Alfred Jarry
in Le goût de la pêche.
 
Chamane51 le 25/05/2012
 
Articles précédents :
 
Serge Sautreau, Le rêve de la pêche
Sean Nixon, Les Nuits du Connemara
Pierre Clostermann, La prière du pêcheur
Pierre Clostermann, Des poissons si grands
Pierre Clostermann, Mémoire au bout d'un fil
Pierre Clostermann, Spartacus, l'espadon
Maurice Genevoix, Tendre bestiaire
Maurice Genevoix, Rémi des Rauches
Jim Harrison, Gary Snyder, Aristocrates sauvages
Pierre Perret, Les poissons et moi
John Gierach, Même les truites ont du vague à l'âme
Pierre Affre, La vie rêvée du pêcheur
Jean-Pierre Comby, Rêves de pêcheur
Henry D. Thoreau, Walden, préface de Jim Harrison
Bartolomé Bennassar, Les rivières de ma vie, Maurice Toesca, Rêveries d'un pêcheur solitaire.
Cormark McCarthy, La route
William G.Tapply, Casco Bay, Dark Tiger
Histoire d'ombres, Hervé Jaouen
Les pieds dans l'eau, René Fallet
Elisée Reclus, Histoire d'un ruisseau
Justin Cronin, Quand revient l'été
Les Ardennes à fleur d'eau, Terres ardennaises
La mouche et le Tao, Philippe Nicolas
Brève histoire de pêche à la mouche de Paulus Hochgatterer
Un bon jour pour mourir de Jim Harrison
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La grande rivière au coeur double, Ernest Hemingway
L'enfant et la rivière d'Henri Bosco
L'enchantement de la rivière de Philippe Nicolas
Le Traité du zen et de l'art de la pêche à la mouche de John Gierach
Partie de pêche au Yemen de Paul Torday
Le Testament d'un pêcheur à la mouche de John D. Voelker
 
Tags : Hemingway, Genevoix, Bosco, Clostermann, Aksakov, Tourgueniev, Paoutovski, Charras
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#Posté le vendredi 25 mai 2012 14:20

Modifié le vendredi 25 mai 2012 14:52

Serge Sautreau, Le rêve de la pêche, Plon, Paris, 1989

 Serge Sautreau, Le rêve de la pêche, Plon, Paris, 1989Serge Sautreau, Le rêve de la pêche
 
LE REVE DE LA PECHE
...ou
Voyages,
secrets,
science,
art,
mystère
et passion
de la pêche à la ligne
...c'est-à-dire
L'EAU
LA NAGEOIRE
 LA PECHE
 L'INCONNU
 
Je viens de terminer les dernières lignes de ce livre, il paraît qu'un nouveau Président vient d'être élu au même moment. Pourtant, je le referme lentement en regardant la bibliothèque pour lui trouver une place d'évidence, entre La vie rêvée du pêcheur de Pierre Affre et Rêves de pêcheur de Jean-Pierre Comby ou bien entre Les pieds dans l'eau de René Fallet et Rémi des Rauches de Maurice Genevoix. Je ne sais plus très bien, il lui faudrait peut-être plus de place encore.
 
« Car vous n'êtes que de l'eau, et vous retournerez à l'eau ! » dit l'Inconnu,
Serge Sautreau.
 « ... car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière. »
Bible, Genèse. 3.19
 
Serge Sautreau fait don au lecteur d'une tentative d'interprétation, de compréhension poétique et littéraire de la pêche, de tout l'acte de pêche. Passant tour à tour par une relecture des grandes mythologies halieutiques, où l'on croise le biblique Noé et Samba Poulo, génie des eaux du fleuve, par un détour ethnologique chez les peuples de la grande boucle du Niger. Le taoïsme convoqué avec un Lao Tseu apprenant à Confucius l'art du bambou refendu noue conversation et non sans humour avec un poisson hypothétique tel que le Boojum de Lewis Caroll dans le poème La Chasse au Snark. On y croise encore un poisson bulle (la carpe), une « Perche du Nihil », cousine probable de la perche-soleil que l'on peut voir avant l'ombre (thymallus). Mythologie drôle, presque loufoque dans un texte fluide toujours en mouvement dont on ne sait comment maintenir la lecture tant le tangage et le roulis sont forts, on s'enfonce dans le texte, on se noie, presque, et nulle poussée d'Archimède vient à votre secours, tant le trémail des phrases et des chapitres vous enserre. Balloté, bousculé même, vous voilà avalé par la narration comme Jonas par la baleine.
Et l'auteur de fabriquer une Nouvelle Bible, celle des eaux mystérieuses et de leurs poissons avec lesquels les hommes, les pêcheurs bien sûr, ont à voir.
 
« Si l'eau est l'origine, le poisson est secret, le leurre est vie,
 et le pêcheur, présence. »,
Serge Sautreau.
 
 
Décrypter les mystères de la pêche n'est pas chose aisée. Les expériences si  particulières de chacun font autant de parcours d'initiés, de révélations, de vérités, de chapelles et d'églises. Sautreau s'y essaie avec brio. Il passe en revue tous les actes de pêche, leurs significations éventuelles. Tente d'établir des lois, cherche le nombre d'or dans les référencements et les classements numériques dont le matériel de pêche est coutumier, avec parfois quelques lucidités sensibles (par exemple la définition de Swim hair que j'ai trouvée dans le Catalogue JMC 2012 p. 188 : « fibres longues et très fines, aux discrets reflets perles, et à la nage souple et onctueuse »). Il s'arrête un long moment « Au c½ur de la touche » pour en étudier la révélation et les possibles divinatoires. Il étudie « La marche du traqueur » du pêcheur à l'ultra-léger, ou de la pêche à rôder, véritable chasse du bord de l'eau (Hemingway et Genevoix n'étaient-ils pas d'éminents chasseurs ?) En revient à « L'envoûtement par la Mouche », quintessence de la pêche, qu'il évoque comme une sorte d'ésotérisme. On ne peut tout dire sur ces deux cent douze pages magnifiques qui deviennent plus littéraires lorsqu'il évoque l'Yonne rivière de mes premières aventures en barque.
 
« L'éphémère s'envole en soie qui fuse.
La volute est sa voie.
Le gobage son éclair. »,
Serge Sautreau.
 
Mais alors que dit la pêche de nous et du monde ? Un effacement, un renoncement au monde, un érémitisme naturaliste ? Serge Sautreau ne recule pas, sa pensée chausse les waders et il va toujours plus loin dans l'eau ou peut-être à la manière des saumons remonte-t-il le courant, fait sa montaison. La pêche ne dit que ce qu'on le veut voir. Ce sera tantôt la caricature du pêcheur du dimanche, vulgate des dessins de Daumier qui fit une certaine réputation ou bien encore le pêcheur élitiste, sorti d'une secte de chapeau à plumes, hermétique à tout autre chose que sa pêche. Sautreau avance quant à lui que la pêche est définie essentiellement par quatre éléments. C'est une métaphysique ou plutôt une sorte de kabbalistique des ronds dans l'eau, une théorie du remous, une mathématique des fluides de la particule liquide à la grande masse océanique. Une éthique que l'auteur définit fort bien : « que soit pêché sur le fil le plus fin, le poisson le plus fort. Si le poisson n'a aucune chance, nous sortons du domaine de la ligne ». Une expérience, celle d'une philosophie naturaliste où le pêcheur entre le ciel et l'eau est un axe du monde et qu'il organise un cosmos à sa mesure. Enfin, elle est aussi une esthétique car la pêche est une recherche du beau, souvent poétique on le sait. Reste le poisson ! L'auteur lui voue un culte, c'est certain. Un culte d'amoureux transi, de dévot mystique, d'artiste peintre, de chamane en transe. La Nageoire est un étendard, une bannière pour l'Internationale des pêcheurs chère à Maurice Genevoix, elle est l'héroïne de bien des chansons de gestes. Et dans nos rêves, dans ces mondes enfouis en chacun de nous, remplis du murmures des rivières et du silence des lacs ouverts comme des grands yeux sur le ciel nous puisons la matière de nos imaginaires et de nos utopies.
 
C'est dans La route de Cormac McCarty, que j'ai déjà évoquée dans ce blog, que je veux chercher la conclusion de cette lecture. Certes, il s'agit d'un roman noir sur l'apocalypse. Mais à la toute fin du livre l'auteur fait se ressouvenir des temps anciens dans lesquels il y avait des truites : « Sur leur dos il y avait des dessins en pointillé  qui étaient des cartes du monde en son devenir. Des cartes et des labyrinthes. D'une chose qu'on ne pouvait pas refaire. Ni réparer. Dans les vals profonds qu'elles habitaient toutes les choses étaient plus anciennes que l'homme et leur murmure était de mystère ».
 
Chamane51 le 06/05/2012
(Article publié dans Naturellement pêche.info)
 
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Modifié le lundi 29 octobre 2012 13:22

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